Chaque année près de chez moi à Colmar, se déroule pendant une dizaine de jours la Foire aux Vins, qui en marge de la foire exposition est également un festival estival de concerts.
Des artistes les plus connus aux débutants, toutes les tendances musicales y trouvent leur place, c’est ainsi qu’au fil des années j’ai pu y voir de nombreux artistes, de Bernard Lavilliers à Joe Cocker, de Murray Head à Lou Reed, ZZ Top, Deff Leppard, Manu Chao ou encore Compay Segundo, j’en passe et des meilleurs…
Hier soir se produisaient donc sur scène deux artistes français de la vague musicale actuelle, dans un double-concert plus que remuant.
C’est la Grande Sophie qui a ouvert le bal et qui a littéralement mis le feu à la salle. Cette fille-là est une furie ! Elle se donne visiblement à fond sur scène, chante, danse, joue de la guitare, saute dans tous les coins, interpelle les spectateurs, bref elle met une ambiance du tonnerre. Alors que ses albums studio recèlent de chansons tantôt douces tantôt rythmées, sur scène elle a un seul mot d’ordre : faire bouger les gens. C’est elle qui le dit dans une de ses chansons : « J’aime le Rock’n Roll ! », et elle l’a prouvé tout du long du concert.
Elle a enchaîné ses tubes les plus connus et les plus enthousiasmants, avec entre autres Martin, Du Courage, La Suite, le Milieu, la Fin, Égoïste, Je ne changerai jamais, On savait (devenir grand), Rien que nous deux au monde … avec une pêche d’enfer et une bonne humeur communicative. D’ailleurs ça n’a pas fait un pli, elle s’est mis le public dans la poche. En moins de temps qu’il ne faut pour le dire, tout le monde chantait et dansait avec elle.
Et alors que je croyais cela réservé aux hard-rockers hirsutes et tatoués de haut en bas, elle s’est jetée tête la première dans la foule en fin de concert et a fait un voyage portée à bout de bras dans toute la fosse pendant que ses musicos s’en donnaient à cœur joie sur la scène ! À l’heure où les grosses stars du rock ne se déplacent plus sans leurs gardes du corps, elle ne s’est pas posé la moindre question avant son bain de foule et ça témoigne de son esprit : festif et déjanté.
J’aimais déjà beaucoup ses albums, mais je dois dire qu’elle prend encore une autre dimension sur scène. À conseiller !
Après la grande brune, c’est un petit brun qui a fait son entrée : Bénabar. Et lui aussi sait s’y prendre pour mettre de l’ambiance dans un concert. En même temps il faut bien dire que la Grande Sophie lui avait déjà bien préparé le terrain, mais il a su ne pas laisser retomber le soufflé !
Comme le concert avait commencé il s’est poursuivi : un artiste habité sur scène et un public conquis devant lui. Entre bons mots, apartés avec le public et chansons drôles et bien foutues, Bénabar a un style bien à lui et avec son air de pas y toucher il sait offrir un spectacle digne de ce nom, même aux gens qui ne viennent pas forcément pour le voir lui. C’est d’ailleurs je trouve une de ses plus grandes qualités : en concert il embarque tout le monde avec lui, les fans comme ceux qui ne le connaissent pas forcément. Ils sont rares ces artistes qui savent enthousiasmer un public à ce point. Pour ma part je l’avais déjà vu (au même festival) il y a deux ans, mais en dehors de cette occasion et de la diffusion sur les ondes de ses chansons, je n’ai jamais écouté ses albums. Autant dire que je connais peu sa musique. Pour autant, quand il se produit sur scène, les rythmes et les paroles de ses chansons fonctionnent parfaitement avec moi. Même sans connaître, je suis happé par le personnage et ce qu’il dégage.
Parce que le gaillard, s’il porte toujours costume et chemise blanche, style BCBG, se lâche complètement dès qu’il tient un micro en main ! L’immobilité ne fait pas partie de son jeu de scène. Il court, se tortille, danse, blague, grimace, saute dans tous les sens, se contorsionne… le tout en chantant évidemment ! Il ne s’offre de répit que lors de chansons un peu plus douces, plus posées, parfois presque tristes. Et le reste du temps il joue et déconne avec les spectateurs et avec ses musiciens, il n’arrête pas une seconde. Il doit être monté sur ressort, c’est à se demander comment il fait pour dépenser autant d’énergie en si peu de temps. Quelque part entre Jacques Brel et Gad Elmaleh, il y a le mutant Bénabar. Son style qui allie jolies chansons et textes amusants lui confère une place un peu à part dans le paysage musical français. Un peu comme un Fernandel ou un Bourvil des années 2000…
Bref, hier soir à la Foire aux Vins de Colmar, ça a bougé, et bien bougé. Difficile de dire qui de la Grande Sophie ou de Bénabar a eu le plus de succès, une chose est sûre, aucun n’a laissé de marbre !
Si la chanson française ne vous rebute pas et si vous en avez l’occasion, allez voir ces deux là en tournée, histoire de partager un peu de leur folie, et garre à vous : le vent d’originalité qu’ils soufflent sur la scène française actuelle pourrait bien vous emporter avec eux !