La suite du film de Disney, qui avait connu un succès surprise en 2003, Pirates des Caraïbes 2 : Le Secret du Coffre Maudit est donc sorti, soutenu par un gros rush médiatique, et a pulvérisé tous les records de l’année dès son premier jour dans les salles.
Dire qu’il était attendu tient du doux euphémisme tant l’attrait populaire se fait sentir pour le film : on en parle un peu partout, et il s’est même permis le luxe inattendu de battre les scores pour un jour de sortie du dernier opus de la troupe du Splendide, Les Bronzés 3 !
Parti comme il l’est, Pirates des Caraïbes 2 devrait connaître une belle carrière pour un film d’été, et culminer certainement autour des 5 millions d’entrées en France.
Il faut dire qu’en dehors de lui, il n’y a pas grand-chose d’alléchant qui sorte sur les écrans ces dernières temps, et la concurrence semble avoir fui comme la peste le mercredi 2 août, jour de sortie de la séquelle made in Disney : trop de risque de sortir en même temps. Logique.
Le film a bénéficié en outre d’une promotion omniprésente depuis plusieurs mois : pas moyen depuis décembre 2005 de se rendre au cinéma sans voir un trailer ou une bande annonce de Pirates des Caraïbes 2 ! Rarement on avait vu ça…
Et visiblement en terme d’entrées, ça a payé.
Pour ma part j’y suis allé sans en attendre quoi que ce soit, n’ayant pas vu le premier (on m’a juste briefé dessus, histoire de connaître un peu les personnages) et pensant surtout y voir du grand spectacle et des images impressionnantes.
Et à ce niveau, je dois bien dire que j’ai été servi. C’est très beau, les images sont léchées et superbement travaillées, les scènes d’action remplissent le cahier des charges, on en a pour son argent en cascades et effets spéciaux en tous genres. En particulier, tout ce qui concerne Davy Jones et son équipage de pirates morts-vivants croisés avec ce que la faune marine recèle de plus hideux, est traité d’une manière parfaite, les effets spéciaux et images de synthèse sont d’une classe incroyable ! L’équipage maudit et son capitaine à tête de poulpe sont le gros point fort du film, sans contestation possible ils sont une vraie réussite et méritent l’admiration du spectateur tant ils sont en tout point parfaits. Idem pour le monstre des profondeurs, le Kraken, dont les attaques très impressionnantes auraient peut-être gagné un tout petit peu à être filmées en plans plus larges par moment, plutôt que presque uniquement en plans serrés sur une ou deux tentacules à la fois. Cela dit, il est malgré tout plutôt réussi, c’est du chipotage de ma part, j’en conviens.
Mais voilà, en dehors de ça, tout le reste du film m’a laissé froid. Peut-être est-ce dû à mon ignorance du premier film, mais j’ai trouvé l’histoire plutôt inconsistante (en gros il faut trouver une clé pour ouvrir un coffre pour sauver l’âme des héros et sauver la belle de service – qui soit dit en passant s’en sort très bien toute seule) et très, très lente à se dérouler… Le film dure 2h30 en tout (de plus l’intrigue ne se dénoue pas puisqu’elle se finit sur un cliffhanger annonçant la conclusion dans le troisième et dernier( ?) opus de la série), et entre les quelques scènes d’action plus ou moins pertinentes pour l’avancée du récit, on a droit à d’interminables scènes de transition, de bavardages et de passages inutiles qui plombent le film. Pour un film d’action à grand spectacle, trouver le temps de s’ennuyer n’est pas vraiment gage de réussite…
Quand par exemple une idée au départ séduisante telle que la scène de « duel à trois » (je crois que ça n’a pas de nom spécifique, si ? un « triel » ça existe ?) se voit étaler pendant une demi-heure alors qu’aucun des trois combattants ne cherche à nuire aux autres (du moins si on en juge aux coups portés en faisant bien attention à ne pas blesser l’adversaire), cette scène qui devrait avoir du peps et apporter du rythme au film devient lassante à force de répétitions à n’en plus finir. Je trouve ça vraiment dommage.
Un film estampillé Disney est forcément à destination du grand public, ou du moins un spectacle familial, pas besoin d’être grand clerc pour s’en douter avant même de le voir. Pas de surprise sur ce point, le film est en adéquation avec son public cible (j’ai même été surpris de voir au tout début un passage à l’ambiance très glauque, avec des corbeaux qui arrachent les yeux de pauvres prisonniers enfermés dans des cages sommaires).
Toutefois je ne m’attendais pas à ce que le personnage principal, Jack Sparrow interprété par un Johnny Depp cabotin au possible, soit traité sur un ton si décalé, à l’humour aussi outrancier et théâtral que ça. Parce que là, non seulement Depp force le trait, mais on peut dire qu’il en recolle une couche supplémentaire dans l’attitude surjouée voire insupportable de son personnage. Roulement d’yeux dans tous les sens, texte proclamé avec extravagance plutôt que joué (on dirait parfois Depardieu en Cyrano), démarche efféminée caricaturale plus digne d’un échappé des Queers de TF1 que d’un capitaine pirate, bref… on a un Sparrow sous acide qui ressemble plus à un personnage de carnaval qu’à un pirate.
Je sais bien que le film n’a pas vocation à être « réaliste », mais là on sombre dans l’excès inverse, et ça a joué en défaveur du film à mes yeux. Je suis bien conscient que ce décalage fait partie des spécificités du personnage, qu’il est voulu ainsi, qu’il fonctionne ainsi et même qu’il plaît ainsi si on en croit le succès du film, c’est juste que dans ce cas je ne dois pas être du tout dans la cible pourtant très large du public visé par Pirates des Caraïbes. J’ai connu la même impression qu’avec des films comme La Momie et sa suite par exemple, dont les excès à caractère prétendument humoristique m’ont rendu le film entier indigeste. Parce que si l’humour est omniprésent dans Pirates des Caraïbes 2, il ne m’a jamais fait rire. Je l’ai détecté, il était là, j’ai bien compris toutes les tentatives de gags et de faire rire, sauf que pour moi c’est tombé à plat à chaque fois. Peut-être est-ce ce côté poussif « on va bien déconner vous allez voir » annoncé à grand renfort de grand-guignol qui m’a bloqué. Peut-être suis-je imperméable à cet humour là, peut-être suis-je coincé, allez savoir. En tout cas, l’humour second degré affiché du film est à ranger, selon mes critères, parmi les points négatifs du film plus qu’autre chose, je trouve qu’il ne fonctionne absolument pas.
Quant aux autres personnages principaux, Keira Knightley dans la peau de Elisabeth Swann sort son épingle du jeu en interprétant un rôle de femme forte et jolie, sans pour autant paraître incontournable (en gros n'importe quelle jolie fille un peu athlétique pouvait faire l'affaire je pense). Will Turner alias Orlando Bloom est certainement le plus transparent de tous, pas insipide juste inconsistant. Bill Nighy (Davy Jones) pour sa part s'en sort très honorablement sous les tentacules du capitaine maudit, bien que le doublage français ne permette pas de se rendre compte du travail effectué sur sa voix.
Alors qu’en est-il de Pirates des Caraïbes 2 au final ?
Comme je n’en attendais rien de spécial je n’ai pas vraiment été déçu. J’en retiens les très belles images et les effets spéciaux somptueux disséminés à travers tout le film. J’en retiens également une étonnante lenteur dans la narration mais aussi des personnages auxquels je n’ai rien trouvé d’intéressant en tant que tels, et donc dont je me suis désintéressé du sort, et du coup de l’intrigue générale.
Pour avoir sondé le net et plus particulièrement les sites consacrés au cinéma, j’ai cru comprendre que le film remporte un vif succès, non seulement en terme de box office, mais aussi de bouche à oreille, les spectateurs l’ayant vu étant visiblement satisfaits du film. Je fais (pour une fois) partie de la minorité de ceux qui n’ont pas trouvé grand-chose d’intéressant dans Pirates des Caraïbes 2, qui pour moi, loin d’être le film événement de l’été, n’est rien d’autre qu’un coup de canon dans l’eau.
Ça fait BOUM et ça fait SPLASH, mais on en ressort à peine éclaboussé alors qu’on nous promettait d’être littéralement emporté par un flot irrésistible d’action et d’émotions fortes…