Certains affirment haut et fort que la télévision rend con.
Moi je ne partage pas du tout cet avis. Je trouve au contraire qu’elle peut être (notez la nuance, ça ne veut pas dire qu’elle l’est toujours) un bel outil d’information, de communication, d’enrichissement, de culture et de divertissement.
Mais je suis bien forcé de me rendre à l’évidence, il existe des émissions qui ne volent pas très haut, si tant est qu’elles parviennent à décoller du niveau zéro de la bêtise. Ce qui très paradoxalement ne veut pas dire qu’elles ne connaissent pas pour autant un vrai succès populaire auprès des téléspectateurs…
Ce qui m’étonne le plus, c’est l’intérêt que trouvent les participants à certaines émissions du type Real-TV et autres jeux trash. Car en dehors d’une humiliation profonde retransmise dans la France entière, et rediffusable à l’infini par la suite dans toutes sortes d’émissions du style Bêtisiers ou Zapping, ils n’ont vraiment pas grand-chose à gagner. Et pourtant, si l’on peut trouver des excuses aux tous premiers participants à de nouveaux concepts (ils ne savaient pas comment ça allait se passer), je suis atterré par ceux qui se précipitent à leur suite, alors qu’ils savent parfaitement bien comment tout cela se terminera…
Je vous propose d’étayer ceci par trois exemples des plus parlants à mes yeux, et qu’à coup sûr tout le monde connaît.
Exemple 1 : La Nouvelle Star.
Bon, d’abord je tiens à préciser que ne captant pas M6, mes connaissances sur cette émission sont très limitées. En fait, ce que j’en connais, ce sont les extraits que j’en vois au Zapping par exemple. Au début de chaque saison donc, il y a des auditions qui permettent de sélectionner les candidats retenus pour l’émission, ce qui s’apparente finalement à une sorte de radio-crochet à l’échelle nationale. Et là, immanquablement, on nous montre une foule d’anonymes qui chantent comme des casseroles, qui se déhanchent, se tortillent, font des mimiques d’un autre monde, bref qui n’ont pour seul talent musical que l’aptitude à déclencher l’hilarité et la moquerie générale.
Et en tant que téléspectateur, c’est très précisément eux qu’on attend de voir passer avec impatience, histoire de rigoler un bon coup. Je ne suis pas hypocrite, quand je vois certains extraits du « Best Of du pire », je me marre bien aussi. Mais voilà, en se plaçant du point de vue des candidats refoulés sans ménagement, on peut se demander : qu’y gagnent-ils ? Rien, strictement rien, si ce n’est une monumentale honte quand le lendemain de la diffusion les gens les reconnaîtront dans la rue et se foutront de leur gueule. Et pourtant ils y vont, ils sont même plus nombreux d’année en année paraît-il.
Bon, cela étant dit, ils trouvent tout de même une excuse à mes yeux. D’abord ils me font bien rire (mais ça, ça ne compte pas !), mais surtout je suis persuadé qu’ils ne se rendent pas compte qu’ils sont risibles. Ils croient (même s’ils se trompent lourdement) en leur chance, en leur talent, et ils ont le courage (l’inconscience ? la folie ?) de s’exposer au jugement de la France entière. En gros, ils sont foncièrement sincères dans leur démarche, et se font bien exploiter par les producteurs de l’émission. Si on devait faire le rapport entre leur temps d’antenne et la force de l’humiliation subie, je crois que de toutes les émissions confondues, ce sont ces candidats là qui exploseraient les ratios !!
Exemple 2 : le Maillon Faible.
Voilà l’exemple parfait d’une émission que je déteste et dont je ne supporte pas plus de cinq minutes consécutives de visionnage. Le concept est très simple : les concurrents répondent chacun leur tour à des questions de culture générale (dont le degré de difficulté oscille entre le « très simple » et le « à peine compliqué ») sur un peu tout et rien. Puis à l’issue de chaque manche, chacun vote pour le nom de celui qu’il veut voir quitter la partie avant la manche suivante.
L’originalité tient dans le fait que l’animatrice (Laurence Boccolini, croisement improbable entre une mère supérieure, un pit-bull et Batman) est là, contrairement à tous les autres jeux télévisés, pour mettre les concurrents plus bas que terre, à grands coups de jeux de mots lancés d’un ton glacial et méprisant. Finalement l’intérêt du jeu ne se résume non pas à voir les concurrents donner les bonnes réponses aux questions, mais à assister à un concours de casse digne d’un Brice de Nice shooté aux hormones de taureau.
Car quoi qu’il arrive, tous les participants quels qu’ils soient, hommes ou femmes, jeunes ou vieux, bons ou mauvais, en prennent plein la face pour pas un rond. Pas un rond au sens figuré comme au sens propre, car le système de jeu est tel que la pression mise sur les candidats annule toutes leurs chances d’aligner le nombre de bonnes réponses suffisantes pour décrocher le jackpot. Il y en a toujours qui font tout capoter, qui banquent trop tôt ou qui se plantent dans la panique, et même les meilleurs se laissent déstabiliser (ou comble de l’ironie et preuve définitive de l’immoralité de ce jeu, ils se font éliminer par les autres qui les considèrent comme « trop forts » et donc dangereux). À l’arrivée les gains de l’unique vainqueur sont la plupart du temps pitoyables.
Bref, si vous participez au Maillon Faible, non seulement les gains éventuels sont minables, mais vous êtes sûr de vous faire allumer devant la France entière par la maîtresse-abboyeuse Boccolini. Encore une fois je me demande : où donc est l’intérêt des concurrents là-dedans … ?
Exemple 3 (et j’ai gardé le meilleur pour la fin) : l’Île de la Tentation.
Le concept est trash, donc forcément attirant. Quatre couples se voient offrir des vacances de rêve dans des lieux paradisiaques. Seul hic, les femmes partent de leur côté et les hommes du leur pour un séjour séparé d’une dizaine de jours. Pour corser le tout, les femmes sont escortées par une escouades de playboys, éphèbes et chippendales bodybuildés triés sur le volet, alors que les hommes sont accompagnés d’une brochette de nymphettes plus provocantes et aguicheuses les unes que les autres. But des tentateurs/trices : faire succomber les concurrents à leurs charmes (oui je sais, ça se rapproche dangereusement sur le papier à de la prostitution, mais de là à traiter TF1 de proxénètes il n’y a qu’un pas … que je ne franchirai pas).
Finalité du « jeu » : après leurs vacances séparées propices à tous les excès (et aux situations extrêmes délibérément provoquées et mises en scène par la production), les couples se retrouvent et doivent décider à la lumière de leurs comportements respectifs s’ils repartent ensemble ou s’ils se séparent, le tout face caméra évidemment. Précision utile : il n’y a aucun gain en jeu, rien du tout à gagner si ce n’est des vacances tous frais payés mais avec vingt caméras en permanence sur votre dos (avec micros longue portée, vision nocturne et tout le tremblement). Au mieux vous repartez comme vous êtes venu, mais avec votre vie sentimentale et sexuelle déballée sur la place publique. Au pire vous repartez seul, mais avec votre vie sentimentale et sexuelle déballée sur la place publique. Et une chaude-pisse ramassée en prime si vraiment vous êtes poissard.
Bref, il n’y a rien de rien à gagner, et absolument tout à perdre (ce n’est pas un hasard si TF1 refuse les couples mariés ou ayant des enfants), à commencer par votre dignité et votre honneur. Car depuis les cinq saisons que l’émission existe, à chaque fois c’est la même chose : que les couples se séparent ou non au terme du « jeu », il y a inévitablement des choses diffusées à l’antenne que les personnes pourront se reprocher après coup, ils n’éviteront pas les pots cassés. Sans parler des discussions pseudo-philosophiques en string, autour de l’amour, de l’amitié et de la fidélité, le tout arbitré par une Céline Géraud à l’encéphalogramme proche de celui de la rainette arboricole, autant à sa place dans cette émission qu’une belle mouche dans un bol de lait.
Parmi les gimmicks récurrents de l’émission, l’un en particulier m’écorche les oreilles à chaque fois que je l’entends : quand les concurrents ou l’animatrice parlent du « jeu », ils le qualifient invariablement « d’aventure ». Intéressant glissement sémantique que de parler de « vivre une aventure » alors que l’expression qui serait la plus appropriée serait plutôt « avoir une aventure »…
Mais attention, je suis sincère : si je parle de l’Île de la Tentation en ayant la dent dure, je confesse également la regarder. Je ne fais pas partie des inconditionnels, mais si l’occasion se présente, je regarde. Au départ par voyeurisme il faut bien le dire, mais ça j’en suis revenu depuis longtemps. Parce que ne vous méprenez pas, malgré l’étalage de chairs, vous ne verrez jamais un téton pointer le bout de son nez, ni aucune autre prouesse physique autrement que suggérée, ou au mieux mimée… Les portes se referment toujours au moment fatidique, le voile tombe toujours pudiquement au dernier moment, comme si TF1 se refusait de confirmer une bonne fois pour toute l’immoralité évidente de ce « jeu ». On nourrit habilement la frustration du téléspectateur tout en maintenant toujours chez lui l’espoir d’en voir « un peu plus » à la prochaine émission…
J’en suis revenu disais-je donc, maintenant ce qui m’intéresse quand je regarde (la plupart du temps, je ne fais d’ailleurs qu’écouter la télé en fond sonore pendant que je pianote sur le net) ce sont les gens qui participent, leurs comportements et leurs discours (souvent parfaitement à l’opposé l’un de l’autre du reste).Et il faut bien dire qu’il y a de véritables phénomènes !!
L’an dernier par exemple a été mémorable : il y avait deux couples qui m’ont particulièrement fait rigoler (cela dit, au premier degré c’était plutôt triste à pleurer). Les petits jeunes du Sud, Marion et Nicolas qui chialaient à chaque fois qu’ils parlaient devant la caméra, c’était incroyable les grimaces qu’ils pouvaient faire, à pleurer de rire (je sais c’est méchant, mais vraiment ils étaient irrésistibles). Ceux-là ont été vraiment sages et ne se sont pas laissés tenter du tout, mais à la place ils sont passés pour de parfaites andouilles.
Quant à l’autre couple, un peu plus âgé, et dont l’accent ne laissait aucun doute sur leur origine du Ch’Nord, Laurence et François, ils sont non seulement passés pour des imbéciles finis (leurs moindres interventions étaient affligeantes), mais en plus pour de véritables obsédés sexuels. Ce qu’ils ont parfaitement le droit d’être, pas de jugement de valeur de ma part là-dessus, ce que je veux dire c’est juste que l’émission leur a collé une image certainement exagérée et totalement déplorable. D’autant qu’ils sont les premiers et seuls depuis l’existence de l’émission à avoir réussi à faire fuir les tentateurs/trices eux-mêmes, dont le rôle est pourtant clairement de séduire les participants.
Retournez au boulot ou allez chez votre boulanger après un été complet où l’on vous montre à la télé comme le con ultime et le lubrique invétéré… Je pense sincèrement que ces gens ont dû subir un enfer après la diffusion des émissions.
D’un côté j’assume le fait que j’ai ri d’eux ouvertement, mais de l’autre j’essaie aussi de me mettre à leur place et je ne parviens pas à comprendre : pourquoi diable avoir fait cette émission ? Et c’est chaque année le même résultat avec juste des acteurs et des circonstances autres. Encore une fois je me répète : quel est l’intérêt des couples qui y participent ? Mystère…
Voilà, après m’être longuement (un peu trop peut-être…) étalé sur mes exemples, je vais essayer de trouver une conclusion à mon article… mmmh, pas facile…
D’abord, bravo aux courageux qui ont tout lu ! (euh, y’a quelqu’un ?)
Donc pour finir je reprendrai ce que je disais au début en complétant un tant soit peu : non, selon moi la télé ne rend pas forcément con, par contre elle nous en montre de sacrés !
(À ceux auxquels il reste une parcelle de courage, vous pouvez laisser un commentaire, pour les autres vous pouvez quitter ce blog et reprendre une activité normale.)