Brian Michael Bendis avait mis un point final à la mythique série Avengers de chez Marvel, avec une saga sanglante et tragique qui s’était soldée sur une conclusion bien sombre. De nombreux morts parmi les héros, la trahison d’un vengeur de longue date, la Sorcière Rouge, et la dissolution de l’équipe des Vengeurs dont les membres ne croyaient plus en l’avenir.
Bref, une fin apocalyptique, à la hauteur de ce qu’avait été la carrière des « héros les plus puissants de la Terre », bien qu’on pouvait lui reprocher certains points contestables (la mort de Œil-de-Faucon en tout premier lieu).
Mais si BMB a enterré les Vengeurs, c’est pour mieux les faire renaître de leurs cendres, le tout à la sauce Bendis cela va sans dire, en remaniant complètement l’effectif.
Ainsi donc naît sous le stylo de BM Bendis et les crayons de David Finch, la série New Avengers, dont le premier arc en six parties (ce format d’histoire est devenu depuis quelques années le standard dans les comics estampillés Marvel) raconte tout naturellement la genèse de cette nouvelle équipe. Cette première aventure, titrée Breakout ! démarre au pénitencier de Ryker’s Island, réservé aux détenus dotés de super-pouvoirs. L’attaque du super-vilain Electro (ennemi récurrent de Spider-Man) dégénère en évasion générale d’une multitude de super-gugusses bien décidés à user et abuser de leurs pouvoirs pour prendre la clé des champs. Déjà sur place, l’avocat Matthew Murdock (Daredevil), l’agent du S.H.I.E.L.D. Jessica Drew (ex-Spider-Woman) et Luke Cage (alias Power-Man) s’associent à Spider-Man alerté par le grabuge et Captain America et Iron-Man envoyés sur les lieux en renfort par le S.H.I.E.L.D. pour contenir les fuyards. Dépassés par la situation, ils sont aidés par un personnage mystérieux, lui-même incarcéré en quartier de haute-sécurité, Robert Reynolds dit Sentry.
Après l’épique bataille, le bilan est mitigé : la moitié seulement des évadés sont repris, les autres ayant disparus dans la nature. Convaincus que l’association inédite de leurs talents pourrait donner de bons résultats, Captain America et Iron-Man décident de former une nouvelle équipe avec tous ceux qui les ont aidé à contrer cette évasion à grande échelle. Seul Daredevil, trop attaché à son indépendance, ne se laisse pas convaincre par l’homme à la bannière étoilée, et bien que le cas de Sentry soit encore sujet à caution, les New Avengers sont créés en cette occasion.
En remontant la piste de Electro, les Vengeurs tombent sur le mutant Karl Lykos, alias Sauron, et partent à sa recherche en pleine Terre Sauvage (une jungle préhistorique coupée du reste du monde en plein continent Arctique), mission au cours de laquelle se joint à eux le mutant Wolverine. Mais la piste remonte encore bien plus loin, impliquant dans un trafic d’armes, d’esclavage d’indigènes de la Terre Sauvage et dans une organisation criminelle de grande envergure de mystérieux individus très hauts-placés, peut-être au sein même du S.H.I.E.L.D. (la force de paix et service de renseignements de l’ONU).
Le premier story-arc se termine sur la révélation de l’existence d’un complot d’ordre mondial sur lequel les New Avengers comptent bien enquêter et démasquer les responsables.
La nouvelle équipe des Vengeurs comprend donc après ces six premiers épisodes les incontournables Captain America et Iron-Man, le remuant Spider-Man et Wolverine dans un genre plus « sauvage ». L’idée de Bendis était d’adopter en partie le concept du concurrent de Marvel, DC avec sa JLA : réunir les héros les plus charismatiques et vendeurs de la maison d’édition au sein d’une même équipe. D’où la présence de Spider-Man pourtant héros solitaire par excellence, et surtout du X-Man vedette, Wolverine en personne, dont l’intégration aux New Avengers a un peu fait polémique chez les fans. En effet, le mutant griffu a non seulement une image très éloignée de celle, très classique, des Vengeurs, mais en plus il devenait ainsi omniprésent dans une bonne demi-douzaine des séries régulières les plus vendues de la firme (sans compter ses innombrables apparitions dans des mini-séries).
Mais Bendis ne se contente pas de prendre les plus connus et d’en faire une équipe comme on exécuterait basiquement une recette qui a fait ses preuves, il y ajoute quelques personnages secondaires ou tombés en désuétudes mais qu’il chérit depuis toujours. Ainsi, il ressort Spider-Woman (la première version, car il y en a eu trois différentes) de la naphtaline où elle avait été oubliée depuis de nombreuses années et c’est un succès : le personnage féminin des New Avengers connaît d’emblée un regain d’intérêt de la part des lecteurs. Autre chouchou du scénaristes, Luke Cage, héros charismatique tout droit sorti de la période Black-xploitation des années 70, mais éternel second couteau, est mis sur le devant de la scène. Et la grande curiosité reste Sentry, un personnage atypique (sorte de Superman sauce Marvel), qui n’a connu qu’une mini-série au succès confidentiel il y a quelques années, mais que Bendis va développer et transformer en une des pièces maîtresse de son équipe…
Bref, cette nouvelle mouture des Avengers séduit bel et bien par son cocktail de classicisme et d’originalité. Le ton est dur, sombre et sérieux, les dialogues restent le point fort de BMB, et le dessin confié au surdoué (quoique par le passé parfois un peu m’enfoutiste) David Finch confirme l’impression de qualité qui se dégage de cette série qui démarre en trombe.
Visiblement Bendis et Finch prennent leur boulot très à cœur et on sent qu’ils désirent marquer de leur empreinte l’histoire des Vengeurs avec ce relaunch en profondeur.
Pour l’instant le pari, bien que très osé, est incontestablement réussi, espérons que la suite confirmera la montée en puissance du duo créatif aux commandes de New Avengers. À lire pour se réconcilier définitivement avec les Vengeurs !
(En VO ça se lit dans les épisodes #1-6 de New Avengers chez Marvel, et en VF dans les #5-10 du magazine mensuel Marvel Icons chez Panini/Marvel France)