Vous avez déjà tous entendu parler des X-Men ? En BD, au cinéma, en jeu vidéo ou encore en dessin-animé, on a eu du mal à leur échapper ces dernières années. Les X-Men, créés dès 1963 dans Uncanny X-Men #1 par Stan Lee et Jack Kirby, après des débuts plus que timides, ont connu le succès à partir de 1975 et de la prise en main du scénario par Chris Claremont. Dans les années 80, leur popularité a littéralement explosé. Depuis ils sont devenus le fer de lance de l’éditeur Marvel, une véritable institution.
Face à ce succès sans égal, Marvel a été très réactive, et s’est empressée d’exploiter le filon. Tout un univers s’est alors développé autour des mutants, tout ce qui était de prêt ou de loin estampillé « X » se vendait comme des petits pains. Les séries spin-off ont donc fleuri : d’abord les Nouveaux Mutants, puis pêle-mêle X-Factor, Wolverine, X-Force, Cable, etc … sans parler des mini-séries évènementielles à n’en plus finir. En 1991, Chris Claremont et Jim Lee lancent une seconde série mensuelle consacrée aux X-Men, sobrement intitulée X-Men, et qui venait donc s’ajouter à Uncanny X-Men. Avec le succès, les personnages mutants s’étaient à ce point multipliés qu’il n’y avait aucun inconvénient à avoir deux équipes d’X-Men distinctes, une pour chaque série.
Tout récemment, c’est une troisième série régulière consacrée aux mutants qui a vu le jour. Pour éviter le phénomène de « ras-le-bol » des lecteurs devant toutes ces séries X, Marvel a joué la carte des « vedettes ». La nouvelle série, baptisée Astonishing X-Men, a été donc confiée aux mains d’une équipe choc : Joss Whedon au scénario (le créateur de Buffy et les Vampires en personne) et John Cassaday au dessin (auteur de superbes épisodes de Planetary entre autres, également dessinateur de Je suis Légion en ce moment chez les Humanoïdes Associés).
Et la fine équipe a fait très fort : Astonishing X-Men #1 s’est vendu à plus de 210 000 exemplaires, et s’est stabilisé aux alentours des 135 000 ventes par numéro, là où ses aînées se vendent en moyenne à 90 000 unités pour Uncanny X-Men et 80 000 pour X-Men. Astonishing X-Men fait partie en ce moment des toutes meilleures ventes de comics aux USA.
Les personnages repris par Whedon et Cassaday pour former cette nouvelle équipe sont des « classiques » de l’univers mutant : Cyclope, Emma Frost, le Fauve, Kitty Pryde et l’incontournable Wolverine. Leur première aventure se compose d’un story-arc de 6 épisodes, nommé Gifted, qui plante à la fois le décor, précise d’entrée les relations entre les membres de l’équipe, introduit un nouvel ennemi (l’extraterrestre Ord), lance plusieurs subplots intéressants et surtout ramène d’entre les morts un autre illustre X-Man. Rien que ça !
Quelques points importants à retenir de Gifted : d’abord les costumes en spandex sont de retour chez les X-Men. En effet, après le succès des films, le scénariste de l’époque, Grant Morrison, avait relégué les costumes bariolés au placard, histoire de mieux coller à la version cinématographique des personnages. Ces dernières années les X-Men arboraient donc un simple uniforme en cuir noir, très passe-partout et sobre. Le retour aux costumes de couleur marque ainsi une rupture avec ce qu’avait fait ces derniers temps Morrison. C’est aussi la volonté affirmée d’ancrer la série dans un contexte plus tourné « super-héros » que ne l’avait fait le scénariste britannique. Bref, Whedon marque sa différence et opère par la même occasion un « retour aux sources » graphiquement parlant.
Ensuite le ton de l’histoire évolue. Le côté très sombre, adulte et froid de Morrison fait place à un rythme plus dans la tendance « actioner », les thèmes graves restent présents mais Whedon insuffle une certaine dose d’humour à ses histoires. D’ailleurs l’expérience des séries télévisées de l’auteur se ressent tout particulièrement dans le découpage de l’action et dans les dialogues vraiment excellents.
Pour ce qui est de l’histoire en elle-même, elle voit les X-Men affronter un inconnu, Ord (qui semble leur en vouloir personnellement pour des raisons encore un peu obscures), pendant qu’une éminente généticienne, Kavita Rao, lâche une véritable bombe dans les médias : elle affirme que les mutants ne seraient pas une nouvelle étape dans l’évolution de l’homme, mais les victimes d’une maladie génétique. Maladie à laquelle elle aurait trouvé … un vaccin ! ce qui n’est pas sans susciter l’émoi au sein de la communauté mutante…
Au cours de leur enquête, les X-Men vont découvrir que Ord et le docteur Rao sont liés, mais surtout que l’un des leurs qu’ils croyaient mort (depuis Uncanny X-Men #390, en mars 2001) était en fait prisonnier et leur servait de cobaye pour l’élaboration du vaccin : Colossus, le géant à la peau métallique, bien vivant et en pleine forme. Celui-ci rejoint logiquement l’équipe dès sa libération.
Scénaristiquement, Astonishing X-Men démarre vraiment bien, c’est indéniable. Moi qui avais certaines réserves sur Joss Whedon (non seulement il débute dans le monde des comics, mais surtout je suis tout sauf fan de ses séries télé Buffy et Angel…), je dois bien dire qu’il est vraiment à la hauteur du challenge. L’autre grande force de la série, c’est l’orfèvre John Cassaday. Il fait ici plus que confirmer son talent de dessinateur, il le magnifie. Dans son style pseudo-réaliste il introduit du punch, du rythme, de la force et du glamour, c’est je pense son meilleur travail à ce jour (du moins de ce que j’ai déjà pu lire de lui).
Astonishing X-Men est une « grosse machine », et elle tire vers le haut tout l’univers mutant de Marvel qui avait bien besoin d’un nouveau souffle depuis le départ de l’excellent Grant Morrison. Si vous ne deviez lire qu’une série X, choisissez Astonishing X-Men sans hésiter, c’est du tout bon.
(En VO ça se lit dans les épisodes #1-6 de Astonishing X-Men chez Marvel et en VF dans les #1-6 du magazine mensuel Astonishing X-Men chez Panini/Marvel France.)