Hier soir au Colisée de Colmar, Albert Dupontel venait présenter en avant-première son troisième film en tant que réalisateur : Enfermés Dehors.
Grand amateur de Dupontel, je me devais d’y être. Bien que je n’ai pas encore vu tous les films auxquels il a participé, tous ceux que j’ai déjà pu voir m’ont plu. Depuis ses débuts grinçants d’humour noir en one-man-show, j’avais pris mon pied devant sa première réalisation, Bernie. Et en tant qu’acteur, le bonhomme a su se diversifier et démontrer l’étendue de son talent en toubib un peu paumé dans La Maladie de Sachs de Michel Deville, en énigmatique convoyeur de fond dans Le Convoyeur de Nicolas Boukhrief, en soldat roublard dans Un Long Dimanche de Fiançailles de Jean-Pierre Jeunet, ou encore dans le très controversé film de Gaspar Noé Irréversible.
Dans Enfermés Dehors, on retrouve avec plaisir toute l’équipe de comédiens de Bernie : Claude Perron, Hélène Vincent et Roland Bertin répondent présent. Manque malheureusement à l’appel Roland Blanche, décédé en 1999. Et s’ajoutent à tout ce beau monde un Nicolas Marie convaincant (qui n’est pas sans rappeler dans son jeu et sa voix Christian Clavier, et qui avait aussi déjà participé à Bernie), une partie de la troupe des Deschiens : Yolande Moreau, Bruno Lochet et Philippe Duquesne, quelques échappés du Canal+ de la grande époque : Gustave Kervern, Bouli Lanners et Jackie Berroyer, et même deux caméos de marque : Terry Gilliam et Terry Jones !
Avec bien entendu un Albert Dupontel au meilleur de sa forme et à la quadruple casquette : co-producteur / scénariste / réalisateur / acteur.
La trame de départ est très simple : Roland, un SDF un peu simplet, trouve par hasard un uniforme de policier et décide de s’en servir pour aller manger incognito à la cantine du poste de police. Il va y rencontrer Marie, veuve et ancienne actrice de porno, dont la fillette Coquelicot (avec un C !) a été enlevé par les beaux-parents. Roland qui prend conscience des avantages de porter l’uniforme, va se prendre au jeu et décide d’aider à sa façon un peu maladroite la jeune femme qui ne le laisse pas insensible…
Voilà pour l’histoire. Comme c’était déjà le cas dans Bernie, Dupontel ne recule devant rien pour mettre en place une « ambiance » très particulière : des personnages souvent pathétiques mais malgré tout attachants, des péripéties loufoques, des dialogues savoureux, une bande son tonitruante (et le mot est faible tant elle est forte et stridente par moments, effet voulu qui rend certaines scènes d’autant plus dérangeantes, incongrues ou décalées), et une bonne dose de rire sous forme de poil-à-gratter.
Dupontel a gardé tout son mordant et son côté rentre-dedans n’a jamais été aussi décomplexé ! En gros c’est un film dingue, de dingue, sur des dingues. Il risque donc forcément de déplaire au plus grand nombre, tant son côté parfois too much gène un peu aux entournures…
Moi j’ai littéralement adoré !
Ils sont rares ces films qui rentrent dans le lard du spectateur, qui font rire avec la tristesse du monde moderne, qui revendiquent haut et fort leurs effets les plus frappants et qui évoluent sans la moindre compromission à la bienséance sans pour autant faire de la provoc gratuite. Celui-ci en est. Il est bourré jusqu’à la gueule de séquences chocs, de délires visuels et de personnages truculents et inimitables. Du Dupontel pur jus.
J’avais adoré Bernie, Enfermés Dehors le surpasse pourtant par moments.
Albert Dupontel a frappé un grand coup avec ce film. Il faut le voir si vous n’avez pas peur de sortir des sentiers battus du cinéma actuel.