En politique c’est bien connu et Frank Dux n’aurait pas dit mieux : tous les coups sont permis. Souvent je m’amuse ou m’agace (c’est selon les jours, la gravité des faits et ma mauvaise humeur) des petits travers rapportés ci et là et qui font du monde politique cet univers impitoyable où JR Ewing en personne passerait pour un enfant de chœur.
Entre les retournements de veste, les mensonges éhontés, les concours de mauvaise foi, les tentatives de récupérations politiques opportunistes au possible (il n’y a qu’à voir en ce moment comment de Fabius à De Villiers tous les candidats à la présidentielle se sentent soudainement proches d’un Nicolas Hulot qui a le vent en poupe), les trahisons de dernière minute et le populisme le plus primaire, nos amis les hommes et femmes politiques appliquent à la lettre la règle qui veut que seuls les plus forts et les plus roublards survivent.
Mais cette semaine la palme de la manipulation et des coups bas revient sans conteste aux statèges Républicains américains qui ont jeté toutes leurs forces dans la bataille de la campagne électorale pour le renouvellement de la Chambre des Représentants et du Sénat outre-atlantique. Alors que le gouvernement Bush perd sans cesse en popularité, la quasi totalité des observateurs s’accordaient à dire avant même les élections du 7 novembre (et les résultats leur ont visiblement donné raison) que les Démocrates allaient triompher et remporter haut la main la majorité des suffrages et de ce fait faire basculer le Congrès jusqu’alors dans la poche de ce bon George Walker.
Mais les Républicains habitués aux remontées de dernières minutes dans les sondages (souvenez-vous la précédente présidentielle) n’ont pas lâché le morceau, et c’est de bonne guerre me direz-vous. Et dans cette optique toutes les façons de gagner des voix étaient bonnes à prendre. Jugez plutôt…
Au cours des derniers jours avant les élections, certains bureaux de soutien aux candidats Républicains ont mis en place une stratégie inédite. Ils ont lancé des campagnes téléphoniques de promotion des candidats Démocrates ! En temps normal cela consiste à démarcher par téléphone les gens chez eux et leur vanter les mérites d’un candidat pour inciter les derniers indécis à voter pour celui-ci. Ça n’existe pas encore par chez nous, mais c’est finalement très semblable à ces coups de fil commerciaux qui viennent très opportunément vous déranger en plein pendant votre épisode de Prison Break pour vous vendre une cuisine Mobalpa, des fenêtres double-vitrage ou un superbe-portable-dernier-cri-à-250-euros-que-vous-venez-de-gagner-cela-vous-fait-il-plaisir (accompagné ça va sans dire d’un abonnement téléphonique pour trois ans non résiliables et hors de prix).
Mais je digresse… ils ont donc lancé des campagnes téléphoniques pour leurs adversaires disais-je… mais en pleine nuit ! À 3 heures du matin votre téléphone sonne et une voix pré-enregistrée scande le nom du candidat Démocrate à vos oreilles ! et vous pouvez bien raccrocher, vous serez rappelé une demi-douzaine de fois dans la nuit histoire de bien vous faire enrager. Objectif : vous faire haïr ce nom avec lequel on vous harcèle en pleine nuit alors que vous ne demandez qu’à dormir du sommeil du juste. Et logiquement vous devriez en représailles voter pour le gentil candidat Républicain qui ne vous empêche pas de dormir lui au moins ! Diabolique non ?
Enfin, disons qu’en théorie oui, c’est astucieux, mais dans les faits je ne suis pas sûr que ce fut très efficace. De nos jours, en pleine ère de la communication omniprésente et de l’information reine, ce genre de chose ne passe pas inaperçu, et finalement il y a fort à parier que la manipulation a été découverte et divulguée avant le jour fatidique des élections et a dû avoir des effets secondaires inverses aux attentes des fins stratèges conservateurs.
Alors… arroseurs-arrosés ?