Je ne suis pas une midinette et je n’ai (à ma connaissance) aucun penchant pour les beaux ténébreux. Je n’arrive pas à préférer une mini tasse de Nespresso à mon bol de café quand j’arrive au boulot le matin. Pourtant j’avoue sans gêne que George Clooney figure dans la liste de mes acteurs favoris *. Donc quand j’ai su qu’il était à l’affiche dans un film nominé aux Oscars (oui je sais, c’est loin d’être le gage de quoi que ce soit qualitativement parlant) et réalisé par Alexander Payne (là déjà c’est autre chose, j’y reviendrai), je me suis dit que ce serait une bonne idée d’y jeter un coup d’œil. Comme ça, pour voir. Et si je n’ai pas été ébloui j’ai tout de même passé un bon moment.
L’histoire prend place dans l’archipel d’Hawaï. Matt King (George Clooney) bosse beaucoup, et néglige plus que de raison son couple et son rôle de père. Un accident de ski nautique plonge sa femme dans le coma, et oblige Matt à s’occuper à plein temps de Scottie, dix ans (Amara Miller) et Alexandra (Shailene Woodley), adolescente rebelle de dix-sept ans. Décisionnaire dans un processus de vente de terres familiales s’élevant à plusieurs centaines de millions de dollars, Matt va devoir prendre de lourdes décisions alors qu’il apprend coup sur coup que son épouse ne se remettra jamais, et que celle-ci avait une liaison. C’est avec ses enfants, et Sid (Nick Krause), l’ami demeuré de son aînée, que Matt va partir à la recherche de l’amant de sa femme…
Je partais avec un a priori positif en allant voir ce film, ne serait-ce que par rapport à ce que j’avais déjà vu de son réalisateur auparavant. Il a, dans les années 2000, signé deux films qui m’ont marqué (et plu, je précise) avec Sideways et Monsieur Schmidt**. Je savais donc qu’il était tout à fait capable de partir d’une situation et de personnages pas forcément extravagants pour raconter de chouettes histoires, et que la simplicité n’exclut pas la profondeur dans son approche des choses… et c’est très exactement ce que j’ai retrouvé comme sensation dans The Descendants. Une histoire au pitch de départ plutôt simple, et un développement tout en finesse, abordant parfois des sujets très graves sans s’interdire des touches d’humour, voire de loufoquerie. À ce titre le personnage de Sid, que j’ai trouvé parfaitement imbitable et con comme un manche au point que je n’en revenais pas d’un tel décalage et d’une telle marque de mauvais goût au milieu du reste d’un film si mesuré, se révèle tout à fait à sa place comme on le comprend dans la dernière partie du film.
Alexander Payne va donc au fil du métrage nous emmener à sa suite sur des terrains qu’on n’attendait pas forcément et posera certaines questions auxquelles il nous invite à réfléchir sans vouloir imposer la réponse qu’il propose. Dans The Descendants il est question d’amour, de haine, de vengeance, de détresse, de pardon et d’espoirs à degrés divers. On varie avec les personnages d’un sentiment à l’autre, parfois contradictoires, et ça permet de se remettre soi-même en question. Quel sentiment l’emporterait chez nous, quelle réaction serait la notre dans de telles circonstances ? Sans intellectualiser à outrance, j’ai trouvé le fond de la réflexion proposée intéressant.
Côté comédiens, Clooney tient le haut du pavé et joue vraiment d’une manière fluide, juste et sincère la somme de sentiments qui assaillent son personnage. De l’inquiétude et la volonté de se rattraper au début de l’histoire, à l’abattement et la dévastation d’apprendre que sa femme est en mort cérébrale, jusqu’à la colère et la haine qu’il ressent en tant que mari trompé en passant par la détresse d’un père débordé par ses enfants qu’il redécouvre dès lors qu’il s’en occupera pleinement… Vraiment, j’ai trouvé son jeu d’acteur brillant, ni trop ni pas assez dans l’expression des sentiments, pour moi c’était une confirmation de plus de son talent de comédien. Mais une autre qui se révèle aussi bonne que belle (non ce ne sont pas des synonymes) c’est la jeune Shailene Woodley, à qui je prédis une jolie carrière si toutefois elle parvient à se tenir loin des twilighteries et autres mièvreries ado-sirupeuses… Et puis c’est toujours un plaisir de retrouver au détour d’un second rôle le sous-employé Robert Forster, ici dans le rôle du beau-père acariâtre dont le caractère de chien, la haine et la dureté ne l’empêchent pas d’être aussi par ailleurs un vieil homme touchant.
Et puis pour la petite histoire, ce film a l’avantage de répondre à des questions autrement plus existentielles. En effet il vous prouvera sans l’ombre d’un doute possible que s’habiller chaque jour de l’année en chemise à fleurs hawaïenne et tongs, c’est pas le truc le plus classe au monde, même quand on s’appelle George Clooney. Ça humanise le bonhomme, c’est le moins qu’on puisse dire. Sans parler de son statut de cocu (et bonjour le baltringue que madame a choisi pour le remplacer…) qui finit un peu plus de l’éloigner de son image de bellâtre dans ce film. Et c’est tant mieux.
Pour résumer, je dirais que The Descendants est un chouette film, pas révolutionnaire loin s’en faut, mais honnête dans ce qu’il raconte, avec des acteurs de talent et une mise en scène intelligente. C’est franchement déjà pas mal non ?
* Liste au sein de laquelle George côtoie les très glamours et sexy Richard Dreyfuss, Paul Giamatti, Takeshi Kitano ou Jack Nicholson par exemple. Juste pour vous situer l’ambiance playboy de cette liste.
** Tiens donc, revoilà Paul Giamatti et Jack Nicholson, quelle coïncidence !