Nicolas Sarkozy est élu président avec 53% des suffrages et un taux de participation record, autant dire que ça ne se discute pas. Encore moins en Alsace où il obtenu un score d’environ 65% d’électeurs en sa faveur, ce qui fait de ma région celle qui a le plus massivement voté pour le candidat de l’UMP.
Dire que je me sens isolé en territoire ennemi serait exagéré, parce que je me refuse à tomber dans le piège récurrent qui consiste à systématiquement opposer gauche et droite sur tous les points. Dès lors que l’on ne fait pas de réaction allergique idiote aux personnes de l’autre camp, j’aime à croire la discussion possible, je reste persuadé qu’il existe des moyens de ne pas sombrer dans les débats d’idées stériles comme c’est trop souvent le cas.
Pour ma part j’ai des potes de droite et nos idées divergentes ne nous interdisent pas de nous apprécier pour nos qualités. Être fermé par idéologie et obtus pas principe, ce n’est pas mon truc.
J’essaie donc d’être ouvert, et plutôt curieux (puisque de toute façon maintenant c’est parti pour au minimum 5 années) de voir ce que Sarko va faire, comment il va tenir ses promesses, et surtout comment les gens vont réagir devant les actes après avoir approuvé (peut-être sans vraiment réaliser à quoi cela va correspondre dans les faits) les discours.
Tel que j’ai lu et compris le programme du nouveau président cependant, j’ai du mal à trouver beaucoup de raisons de m’enthousiasmer…
Pour commencer, on va pouvoir dire adieu au CDI au profit d’un contrat de travail unique et plus ou moins inspiré du CNE, autrement dit le prototype du fameux CPE. Rappelons pour mémoire que Sarko était contre le CPE pour 2 raisons principales : parce que ça ne concernait que les jeunes (il aurait voulu que ça s’applique à tout le monde) et parce que ça faisait chier Villepin. Bref, moins de protection du travailleur, un droit du travail mis à mal, et la précarité de l’emploi qui va (encore) faire un bond en avant. Ça m’a toujours sidéré qu’on puisse faire avaler au gens ce concept iconoclaste qui veut que pour protéger l’emploi et lutter contre le chômage on facilite les licenciements. En même temps puisqu’il suffit de radier des gens d’une liste pour faire croire qu’ils n’existent plus, sûr que Sarko va y arriver à ses 5% de chômeurs…
Ensuite il va falloir faire des économies, de grosses économies. Pas sur le budget de la défense, pas sur les cadeaux fiscaux aux entreprises en bonne santé qui licencient pour plaire au système boursier devenu roi. Non, les économies se feront sur les dépenses publiques, traduisez dans le vocabulaire de Sarkozy par la diminution drastique du Service Public. Entendons-nous bien : je suis persuadé qu’il y a des choses à faire pour moderniser et améliorer le fonctionnement du service public, mais Sarko ne se pose pas la question sous cet angle, puisque sans enter à aucun moment dans les détails de sa proposition, il avance simplement le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux qui part en retraite. OK.
Je me permets juste de rappeler qu’à longueur d’année tout le monde se plaint d’un manque d’enseignants, du dénuement des hôpitaux publics, du déneigement jamais assez rapide des routes en hiver, sans parler des effectifs de la police dont le renforcement est souhaité par une immense majorité. Alors Nico tu vas virer qui ? moi je le sens venir gros comme une maison : finies les lignes SNCF qui ne rapportent pas assez (autrement dit tu habites un petit patelin et tu n’as qu’un train pour aller bosser… eh bien tu n’en auras plus du tout), fermés les bureaux de Poste qui ne sont pas au centre des grandes agglomérations ( et tant pis mémé s’il faut faire 40 bornes pour aller à la Poste la plus proche, tu te démerdes), bradées au privé GDF et EDF, les fleurons du public qui rapportent pourtant du fric à l’État, et tant pis pour la hausse de vos factures d’énergie à venir (car dans tous les pays qui ont privatisé ces secteurs les prix se sont envolés). Sans même parler du désengagement de l’État d’une multitude de missions publiques. Exemple : presque toutes les routes nationales qui sont refourguées aux départements (avec tout un tas d’autres missions dont ils se seraient bien passées d’ailleurs). Ça vous fera soi-disant payer moins d’impôts sur le revenu à l’État et ça fera revenir Johnny en France. Mais ne vous inquiétez pas, vos impôts locaux vont faire un bond très bientôt. Ou alors on laisse les routes à l’abandon, au choix. Autre solution : on colle des péages partout même hors autoroutes, on verra bien si l’usager va faire des économies…
Bref, si il est en effet nécessaire de rationaliser les dépenses publiques, démanteler le Service Public n’est pas la bonne solution à mon avis. On y va tout droit pourtant.
Quoi d’autre ? eh bien prévoyez dans les mois qui viennent des grèves, des manifestations et un beau bordel. N’oubliez pas que l’an prochain on fête les 40 ans de mai 68…
Sinon juste un mot sur les futurs ministres… J’aime beaucoup Jean-Louis Borloo, mais j’espère sincèrement qu’il ne sera pas premier ministre. Tout le monde pronostique François Fillon et j’espère que ce sera lui. Et qu’il s’entourera au gouvernement de types comme Coppé, Devedjian, Douste-Blazy, Juppé, Bachelot, Boutin, toutes celles et ceux que je ne supporte pas, les rigolos de première qui ont les dents qui rayent le parquet, les imbuvables. Juste histoire d’accélérer leur chute par leur impopularité (parce que la gauche n’a pas le monopole des têtes à claques !)
Si Sarko est malin il collera des têtes plus populaires et sympas, comme Borloo, Santini, Rachida Dati –et j’ai même entendu parler de Bockel !-, aux postes importants. De toute façon il lui faudra faire des choix judicieux étant donné qu’il a annoncé qu’il n’y aurait que 15 ministres et la parité hommes-femmes (bonne blague ça aussi d’ailleurs).
Bref, je suis vraiment curieux de voir ça. Les prochains temps vont être mouvementés, et les perspectives pas forcément très réjouissantes. Vas-y Nico à toi de jouer. Fais ce que tu as dit comme tu l’as dit, qu’on voit si les français t’ont élu sur tes idées ou sur tes slogans. On dit souvent que le pire ennemi du PS c’est le PS lui-même, quelque chose me dit que ça va se décliner à droite aussi…