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Avant de lire les notes que je fais sur les films que je vois et les bd que je lis, sachez que dans mes commentaires il m'arrive parfois de dévoiler les histoires et les intrigues. Ceci dit pour les comics, je n'en parle que quelques mois après leur publication, ce qui laisse le temps de les lire avant de lire mes chroniques.
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22 juin 2020 1 22 /06 /juin /2020 19:22

Il paraît que l'âge c'est dans la tête. Z'en causerez à Buck Schatz, il risque de ne pas être aussi affirmatif que cela. Buck Schatz a 87 ans, et il coule des jours tranquilles d'une retraite bien méritée à Memphis, Tennessee. Buck Schatz est une légende de la police locale. Pour tout dire, c'est lui qui a inspiré le personnage de l'inspecteur Harry, incarné au cinéma par Clint Eastwood. C'est dire si Buck est un dur. Un bonhomme, à l'ancienne. Ce n'est pas parce que le corps ne suit plus toujours et que la mémoire a parfois des ratées que le caractère a changé. Rose, son épouse qui le supporte depuis 64 ans de mariage, est bien placée pour le savoir. Alors quand Buck apprend que celui qui l'a torturé dans les camps allemands de la seconde guerre mondiale, Heinrich Ziegler, n'est pas mort comme il l'avait cru si longtemps, et qu'en plus de cela il se serait enfui avec un magot en lingots d'or, la décision de Buck est très vite prise. Il va ressortir son .357 Magnum et retrouver ce fumier. Complètement déconnecté du monde actuel et de la technologie moderne, Buck a cependant conservé ce qui lui a toujours servi au cours de sa carrière de flic : un instinct de limier et des méthodes musclées. Bon, pour les muscles, il aura juste un peu besoin de l'aide de son petit-fils Tequila. Tequila ? C'est comme ça qu'il a surnommé le gamin, qu'il aime bien taquiner. Ou alors il a juste du mal à se souvenir de son prénom...

 

Voilà grosso-modo le début de l'intrigue de Ne deviens jamais vieux ! de Daniel Friedman, un mélange détonnant de polar et d'humour bien trempé. Et les amis, j'aime autant vous dire que dans le genre c'est très réussi !

Sur le fond pas grand-chose d'inédit : un flic bourrin, une chasse-à-l'homme, un trésor de guerre, une vengeance, un Magnum 357. Mais sur la forme il y a une bonne dose d'originalité. Faire du héros principal un octogénaire irascible déjà j'aime, mais en plus ça fonctionne carrément du tonnerre. Le récit à la première personne aidant, on ne peut s'empêcher de s'attacher à ce personnage hors-normes. Daniel Friedman nous fait plonger dans l'esprit de Buck, on se retrouve dans la caboche de cette vieille tête de mule et on suit ses raisonnements d'un autre âge ainsi que ses réflexions pas du tout dans l'air du temps. Car s'il a perdu en force et en vigueur, la répartie cinglante, l'humour à froid et le cynisme carburent toujours à fond chez Buck. Et c'est une des parties les plus réussies du roman : le ton trouvé par Daniel Friedman est véritablement unique et irrésistible. Il fait de ce vieux grincheux de Buck un personnage surprenant et plus profond qu'on ne pourrait le prendre au premier degré. Il plane sur lui un parfum de nostalgie qui ne dit jamais son nom, certainement parce que ces générations-là avaient en eux une pudeur exacerbée qui leur interdisait de s'épancher sur ce genre de sentiments. C'est d'ailleurs tout à fait évident quand il aborde le sujet de son fils, décédé prématurément. Peut-être est-ce même cette disparition qui l'aura définitivement figé dans le temps, ne laissant que son corps subir l'influence du temps qui passe, sa personnalité restant à jamais dans l'état d'esprit des années 1970...

 

Sûr de lui quand il affirme quelque chose, archétype de l'insoumission à la connerie ambiante et à la tyrannie des temps modernes, infatigable râleur, provocateur à ses heures, pratiquant un réalisme cynique qui pointe toujours là où ça gratte le plus, parfaitement conscient de ses limites physiques mais refusant obstinément de s'avouer vaincu pour si peu, amoureux et protecteur avec son épouse, l'octogénaire Buck Schatz est un personnage comme on n'en croise pas souvent. Et c'est sur lui que repose tout le succès de ce roman : un héros à l'hiver de sa vie qui marque les esprits et qui ne laisse personne indifférent.

 

J'ajoute parce que je trouve que ça mérite d'être noté : il s'agit du premier roman de son auteur, et pour une première c'est vraiment prometteur. Ah, et une ultime précision : Daniel Friedman explique dans un petit texte en fin du bouquin que son héros lui a été inspiré en partie par son propre grand-père auquel il voulait rendre hommage à sa manière.

 

Un très chouette roman que ce Ne deviens jamais vieux ! Lecture vivement conseillée.

 

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