J’ai adoré.
Comment ça c’est un peu court comme chronique d’un film ? Pourtant, ça se résume à ça au bout du compte. Bon, ok, je vais tâcher de développer un peu alors. Mais je vous préviens : j’ai adoré.
Ding-Ding, grande nouvelle : je suis fan de super-héros. Pour être plus précis, je suis un fan de l’univers Marvel. Parce que j’ai grandi avec. Leur concurrent direct, DC Comics, ne m’a jamais autant attiré, ni jamais autant plu à la lecture. Ce n’est pas un choix délibéré à la base. Gamin je lisais Strange, Titans, Spidey et consorts, tous estampillés Marvel. Parce que c’est ce qui se trouvait le plus facilement chez mon marchand de journaux et sortait avec la meilleure régularité aussi. Si bien que j’ai grandi avec les héros Marvel et que j’en lis depuis environ 8-9 ans. Pardon, depuis mes 8-9ans, ce qui fait, allez arrondissons, 35 ans de lecture. Sachant que la plupart des comics Marvel ont une périodicité de parution mensuelle, et que j’ai lu à peu près toutes1 les sorties en VF à partir du moment où je suis tombé dedans, ça fait pas mal de pages à l’arrivée. Faudrait que je m’amuse à faire le calcul un jour tiens.
Tiens ? une araignée dans l'espace !
Donc les X-Men, l’Araignée, les Vengeurs, les 4 Fantastiques, Daredevil, Serval, Hulk, Captain Marvel2 et encore tant d’autres, j’ai littéralement grandi avec eux. Et ils ont grandi avec moi aussi, puisque j’ai vu les personnages et les séries évoluer, muter, se transformer, prendre de l’ampleur ou parfois disparaître, jusqu’à devenir aujourd’hui la source d’icônes de la culture de masse par l’intermédiaire du succès des adaptations cinématographiques. Maintenant tout le monde connaît Captain America et Iron Man. Même les Gardiens de la Galaxie sont des stars, alors qu’à la base ce sont d’obscurs troisièmes couteaux de l’univers Marvel papier. Parfois j’ai envie de dire « hey, j’étais là avant, moi ! » à tous ceux qui s’improvisent spécialistes en super-héros parce qu’ils ont vus tous les films Marvel dans l’ordre. Avant c’était plus intime, plus méconnu, plus méprisé aussi d’ailleurs3, mais en même temps plus confortable, plus underground, plus libre comme univers auquel s’intéresser… Dire qu’aujourd’hui avec Avengers : Infinity War, tout le monde sait qui est Thanos, en tant que fan qui a découvert tout ça dans les années 80, je n’en reviens pas.
Chhhhhuuuuttt moi aussi je me suis évadé d'un comic book, ne le dites à personne...
Bon je vais doucement ranger ma panoplie de vieux con bougon parce que sinon vous allez croire que je suis du genre à radoter à grands coups de « c’était mieux avant ».
Or ce n’est pas le cas. Au contraire je ne boude pas mon plaisir de voir mes héros de papier, ceux qui ont bercé mon enfance, mon adolescence, et ont accompagné toute ma carrière de lecteur de comics, prendre vie sous mes yeux, « pour de vrai » dans des films qui ne sont même pas des dessins animés !! Quand j’ai vu la première fois Logan sortir ses griffes et se bastonner dans un ring (rappelez-vous le premier film X-Men), j’en ai eu des frissons4. Et ce n’est pas une façon de parler, mais bel et bien une réaction physique primaire qui a parcouru tout mon corps. Quand j’ai découvert Spiderman s’élancer au bout de sa toile dans le premier film de Sam Raimi, j’étais comme un môme : émerveillé, excité comme une puce, un grand sourire scotché sur le visage. Et avec Avengers : Infinity War, j’ai eu la même sensation, du genre qui va chercher dans les profondeurs, une réaction presque enfantine, en voyant l’impressionnant Thanos à l’écran. Pas quand il apparaît, pas quand il se bastonne avec tout ce qui porte un costume de super-héros dans l’univers cinématique Marvel, mais à la toute fin du film, un des derniers plans, où il sort de sa cabane, s’assied à terre, contemple le paysage et sourit. Pas d’un sourire de conquérant, ni d’un sourire sardonique de méchant fier de sa vilenie, non, mais d’un sourire de soulagement, de contentement et de contemplation. Un sourire sincère de celui qui a accompli une tâche difficile pour la bonne cause. J’ai vu cette scène toute simple à l’écran, et j’ai revu toutes ces cases de BD où Thanos combat tous les super-héros de la Terre, passe pour un fou furieux, un amoureux de la mort et de la destruction5, et qu’il soit vainqueur ou vaincu, reste toujours profondément seul et incompris. J’ai vu tout ça défiler dans cette scène, j’ai vu l’âme du personnage de papier6 qui a hanté tant de mes comics, mise à nu à l’écran. Et ça m’a fait un effet bœuf.
Des vignettes de BD me reviennent en tête...
C’est pour ça que j’ai adoré ce film. Pas seulement aimé, comme la plupart des autres films de super-héros que je vois régulièrement. Vraiment adoré.
Pour ça et pour plein d’autres choses : des images à couper le souffle, des combats homériques, des scènes d’une majesté incroyable, une profusion de personnages, des émotions qui balaient tout le spectre depuis le plaisir pur jusqu’au désespoir le plus noir, des petites doses d’humour, des idées sympas et novatrices, un rythme haletant, des enjeux puissants. Mais l'immense réussite du film tient avant tout dans le personnage de Thanos qui enterre, et de loin, tous les autres super-vilains qu'on a déjà pu voir un jour à l'écran (et ridiculise encore un peu plus si c'est possible, le Steppenwolf tout minable de la récente JLA).
Et puis également parce que j’ai partagé ça avec mon fils Nathan au cinéma. J’ai des souvenirs très clairs et très forts de films qui m’ont marqué à vie et que j’ai vus au ciné au même âge que lui (E.T. ou les premiers Indiana Jones par exemple !!!), et je me dis que peut-être celui-ci laissera chez lui une trace semblable, durable. Et me dire que ce sera un peu associé à moi en même temps, ça me fait plaisir.
La bataille du Wakanda vue par le Faucon
Alors voilà, j’avoue que c’est un peu léger comme critique de film, parce qu’en fin de compte j’ai très peu parlé du film et beaucoup de moi.
Mais ce n’est pas grave, j’avais surtout envie de causer de ce que ça a éveillé en moi plutôt que de commenter l’histoire, le scénario, les acteurs, les réalisateurs, les effets spéciaux, la musique et que sais-je encore… pour tout ça, vous qui irez le voir vous ferez votre propre opinion, vous êtes grands maintenant ! ;-)
1 « à peu près » j’ai dit hein, je suis cependant encore très loin de prétendre à l’exhaustivité.
2 vous aurez remarqué que j’utilise volontairement les noms de l’époque, aujourd’hui, vu l’ampleur mondiale du phénomène, les noms anglais sont la norme et on parlera donc uniquement de Spiderman, des Avengers, de Wolverine voire même des Fantastic Four…
3 non seulement la BD avait déjà plutôt mauvaise image (huhuhu jeux de mots) par rapport à la littérature, mais les comics étaient dévalorisés par rapport à la BD franco-belge (les mangas ont connu le même sort lors de leur émergence par chez nous). Remarquez, je commence à constater actuellement que ce sont les films de super-héros qui acquièrent une réputation de films sans intérêt et sans profondeur, et qu’ils sont de plus en plus souvent brocardés comme du sous-cinéma par les gardiens auto-proclamés du « vrai cinéma ». L’histoire change de médium, mais a tendance à bégayer…
4 la seule autre fois où j’ai ressenti ça au cinéma, ça a été la première fois que j’ai vu Jurassic Park sur grand écran. Vous savez, la scène où le professeur Grant voit pour la première fois un brachiosaure et qu’il en est si éberlué qu’il doit s’asseoir par terre, l’émotion lui faisant perdre l’usage de ses jambes : j’étais pareil que lui, sauf que j’étais déjà assis moi. Croyez-le ou pas, mais j’ai eu les larmes qui me sont montées à ce moment-là du film, je n’en revenais pas de ce que je voyais : des dinosaures, des vrais dinosaures devant moi sur l’écran, comme j’en avais rêvés toute mon enfance (car je lisais beaucoup de comics, mais j’avais aussi une collection non-négligeable de livres sur la préhistoire, que je connaissais tous par cœur pour les avoir lus et relus un nombre incalculable de fois). Le choc que m’a procuré ce film a été si brutal, que j’ai été obligé de le revoir quasiment dans la foulée, pour être sûr de n’avoir pas rêvé. Et je porte toujours cette scène culte dans mon cœur de cinéphile / grand enfant / gamin fan de dinosaure. C’est pareil pour l’apparition de Wolverine à l’écran.
5 il est d’ailleurs réellement « amoureux de la mort ».
6 car oui je vous assure que les personnages de papier ont une âme !
L'affiche du film : il y a du people !